A Londres, j’ai eu la chance de travailler pendant deux ans dans une école “active” aux pratiques pédagogiques innovantes et tout simplement géniales. Comme mot d’ordre, on me disait de ne parler que 10 minutes grand maximum à chaque séance de 45 minutes. 10 minutes ?!
10 minutes, c’est le temps qu’il faut pour : lancer une consigne en début de cours, puis faire une remédiation en fin d’heure. 10 minutes, c’est court ! Mais presque déjà trop long, en réalité…
Dans le système éducatif français, on parle beaucoup… Moi la première ! J’ai commencé mon métier en ressortant épuisée de mes heures de cours. Et pour cause : je ne faisais que parler ou presque pendant toute la journée, et laissais peu de temps d’autonomie à mes élèves.
Comment leur demander ensuite de retenir tout ce blabla huit heures par jour, cinq jours par semaine, sur près de 15 ans d’école ? Impossible !
Pour apprendre et renforcer la grammaire et l’orthographe qui font tant défaut à nos jeunes aujourd’hui, nous faisons en classe des “dictées négociées” : le principe ?
chaque élève fait sa dictée dans son cahier, tout seul ;
puis, on se met en équipe : idéalement, 4 élèves ;
c’est là que les choses intéressantes commencent ! Il faut réécrire sur une grande feuille la dictée, se mettre d’accord, expliquer à ses camarades pourquoi on pense avoir raison. C’est là que l’art de la négociation entre en jeu
puis, on accroche les dictées de toutes les équipes au mur : les élèves se lèvent et se mettent en cercle devant le mur de dictées (que ça fait du bien de se lever un peu en classe !). On entoure les différences d’orthographe entre les dictées.
moment de remédiation : les élèves se rassoient, et nous discutons tous ensemble de la bonne orthographe de tel ou tel mot.
enfin, retour à la dernière étape en individuel : chaque élève note le texte corrigé dans son cahier.
En tout, je ne parle que 10 petites minutes : ce sont les élèves qui mènent l’activité. Elle est morcelée en plusieurs petits temps durant lesquels les élèves parlent ou écoutent les autres, restent assis ou bien se lèvent. On casse l’ambiance de classe muette et statique
Ce jeu de la dictée négociée permet non seulement de travailler son orthographe mais aussi de développer l’esprit d’équipe, l’écoute, l’entraide et l’empathie.
Et moi, je n’ai qu’à faire l’arbitre quand ça se dispute un peu trop fort autour de la table à cause d’un -s oublié ou d’une terminaison verbale qui fait débat !



