Donner le goût de la lecture aux élèves à l’ère de TikTok ? Challenge accepté !
Quoi de mieux que de faire une séance lecture en plein air sous ce soleil radieux sur les toits-terrasses de l’école pour susciter l’envie de lire chez nos ados ?
A l’ère où les téléphones envahissent le quotidien de nos enfants et les éloignent de la lecture, qu’il est difficile de créer et susciter le goût de lire quand les divertissements superficiels et à volonté sont à portée de doigts !
Scoop !
Jusqu’à mes seize ans, je n’ai jamais ouvert un livre de ma vie pour lire quoi que ce soit. Et pourtant, l’année de ma première, je me suis passionnée pour la littérature au point de m’y consacrer durant cinq ans d’études et d’en faire mon métier depuis bientôt quinze ans !
Enfant, je n’ai jamais baigné dans une ambiance de lecture à la maison. Ce n’était pas dans les habitudes de mes parents, ni de mon frère, ni de ma soeur. J’ai vécu dans une ambiance branchée sur la TV matin, midi et soir. Pourtant, combien de fois me suis-je fait sermonner que je devais “lire plus souvent” !
A l’école, je trouvais toujours un moyen d’échapper à la lecture des œuvres que l’on nous imposait en cours de français (et j’insiste sur le verbe “imposer”). La vue du livre en lui-même, à l’édition vieillotte, écrit en tout petit et au titre peu attirant (“Le bourgeois gentilhomme”, “Candide”, “Germinal”… Sait-on seulement ce que tout cela signifie lorsque l’on est un ado ?) me donnaient des sueurs froides !
Entrée en seconde, j’exécrais le français ! Ma professeure à qui, un jour, timide et tremblante, je tendis mes premiers écrits à la fin du cours, éclata de rire dès la première ligne. Les lectures qu’elle imposait à ses élèves de quinze ans étaient abominablement ennuyantes. Je n’en lisais pas une ligne, zigzaguait entre les contrôles de lecture, et finis par récolter un 9 de moyenne en français à l’année. C’en était fini du français pour moi : la rupture était irrémédiable.
Pourtant, l’année de ma première, c’est la révélation : une professeure me donne enfin le goût de la lecture et creuse ma curiosité littéraire. Je me découvre une sensibilité que je n’arrivais ni à comprendre ni à discerner : celle des mots et leurs pouvoirs.
A la maison, mes parents se séparent. Entre les cris, et contre toute attente, je me réfugie dans la lecture, et ne me sépare plus de mes livres, que je pose fièrement sur le coin de mon bureau au lycée. Ils deviennent mes plus précieuses thérapies et construisent mon identité. En terminale, je suis perçue comme “la littéraire, celle qui lit et qui écrit”. Les livres me rendent fière et un peu marginale. Une différence que j’adore cultiver alors que tout le monde cherche à se ressembler !
Le jour de l’oral du bac de français, l’examinatrice me pose une dernière question en fin d’entretien : “si vous étiez un jour professeure de français, comment donneriez-vous le goût de la lecture à vos élèves ?” Je réponds sans hésiter : “Je m’inspirerais de l’expérience de Daniel Pennac dans son livre Comme un roman, dans lequel il raconte lire à voix haute devant ses élèves avec un ton expressif qui donne envie de dévorer les livres.”
Depuis, j’ai pris ma revanche…
Aujourd’hui, sous un ciel éclatant qui fleure bon les prémices du printemps, je repense souvent à ma professeure de première, à l’enfant rebelle à la lecture que j’étais, puis à l’ado passionnée que je suis devenue.
Désormais adulte et enseignante, il m’est inconcevable de ne pas me réconcilier avec ses mauvais souvenirs de lecture que j’ai connus et de reproduire les mêmes erreurs dont j’ai été victime. C’est un hommage à cette enseignante – celle qui a fait éclore ma vocation littéraire – et aux livres qui ont bouleversé ma vie que je pense chaque jour où je me retrouve devant mes élèves.
Associer la lecture à un moment doux, calme et agréable comme aujourd’hui en sortant de l’espace-classe, casser la routine, choisir de belles éditions alléchantes, étudier un roman aux thèmes qui parlent à des ados de douze ans, sont autant de petites choses mises en place et qui, je l’espère, peuvent déclencher le goût de la lecture chez les jeunes.
Ne sont-ils pas tout simplement craquants avec leur livre à la main, plongés et concentrés dans leur lecture sous le soleil danois ?
Et vous, quel rapport à la lecture entretenez-vous ? Je serais curieuse de vous lire en commentaires !


